Le Fossoyeur (Showel Ready), par Adam Sternbergh

Spademan est un tueur à gages. Quelle que soit la raison pour laquelle vous l'engagez, il tue quiconque sans distinction de genre ou de "race". La seule restriction : la cible doit être majeure. Alors, quand il reçoit un appel d'un télé-évangéliste très médiatique, il accepte l'affaire. Il s'agit là d'un boulot comme un autre... Cependant, en menant l'enquête pour retrouver sa future victime, ce qu'il apprend sur celle-ci va lui faire se poser quelques questions...

illustration d'Aurélien Police
Le plus difficile quand on rédige un petit résumé comme celui-ci, c'est d'en dire assez pour donner envie (ou pas, c'est selon) sans en dire trop pour ne pas trop dévoiler l'intrigue. Forcément, en lisant celui qui introduit cette chronique, vous vous dites que j'ai viré ma cuti en me mettant à lire du polar (la réponse est non, j'en lis toujours aussi peu). Or Le Fossoyeur d'Adam Sternbergh est bien un roman noir. Cependant, comme il paraît dans la collection Lunes d'encre, cela ne peut pas être aussi simple. Parce qu'un pitch se doit d'être succinct, je ne peux pas toujours y donner le contexte dans lequel se déroule cette histoire. Car Spademan (sé)vit dans un New York post-apocalyptique, après que des attentats extrêmement meurtriers ont été commis. Mais là encore on ne peut en dire trop sans déflorer l'intrigue...

Ce qui frappe le plus dans ce premier roman d'Adam Sternbergh, c'est le personnage principal. L'"homme à la bêche" (traduction littérale de Spademan, tandis que le titre original du Fossoyeur, Showel Ready, peut être traduit par "La pelle est prête") avait une vie avec boulot et femme et du jour au lendemain il a tout perdu. Jusqu'à son sens moral qui l'empêchait de commettre des crimes (comme la grosse majorité des gens). Aucune perversité de sa part, juste un moyen comme un autre de s'en sortir dans un monde devenu complètement fou. Et si un événement déclencheur a provoqué en lui un vide immense, lui ôtant jusqu'à son empathie, il tente de (sur)vivre malgré tout. Alors bien sûr on peut ne pas adhérer à la philosophie de cet anti-héros qui a fait de la mort des autres sa raison de vivre, mais son cheminement personnel tout le long de ce livre va nous le rendre finalement plus humain que ce qu'on aurait pu croire de prime abord. 

Et si ce livre s'aborde comme un polar, il s'achève bien comme un roman de science-fiction (de cyberpunk pour être plus précis). Cette transformation s'opère parallèlement à l'évolution de Spademan, et ce de manière très subtile, tout en nuances.

Dans ce roman court, Adam Sternbergh déploie un style sec, épuré, qui ne fait pas dans la fioriture (la traduction de Florence Dolisi me semble parfaite sur ce coup-là). Très vite, des images cinématographiques viennent dans l'esprit du lecteur. On ne sera donc pas étonné d'apprendre qu'une option a été posée par Hollywood sur ce livre (après, le voir un jour sur le grand écran, c'est une autre histoire).

Bref, vous l'avez compris, j'ai beaucoup apprécié ma lecture de ce formidable bouquin. A recommander sans modération (si ce n'est le prix, plutôt prohibitif pour un roman aussi court).

Le Fossoyeur (Showel Ready) - Denoël - collection Lunes d'encre - traduction de Florence Dolisi - 272 pages - 19,90€ - D.L. : mai 2015

note : III

A.C. de Haenne

P.S. : un grand merci à Cornwall pour son prêt, sa chronique est à découvrir ici.


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